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En mammalogie, deux cents à trois cents
sujets étaient représentés, du lynx boréal à la
marmotte des Alpes. On pouvait même admirer
les reliques d’espèces éteintes, à l’image de ce
crâne de mégacéros, sorte de cervidé doté de bois
impressionnants disparu à la f in du Quaternaire, ou
de cette corne d’auroch découverte dans le secteur
de Remiremont. On peut citer par ailleurs quelques
phénomènes proposés par les reptiles comme ce
caïman à lunettes de deux mètres de long tout
droit débarqué de Guyane, ainsi qu’une très belle
collection entomologique et un large éventail de
variétés de mollusques et de polypiers. Impossible
enf in de ne pas mentionner l’herbier du docteur
Mougeot qui contenait près de soixante mille
taxons ! Cet ensemble de collections a été retiré
de la galerie d’histoire naturelle après la Seconde
Guerre mondiale au prof it de la peinture ancienne,
de l’archéologie et de l’imagerie populaire. Du legs
du médecin de Bruyères, outre une partie de son
herbier et de sa bibliographie, le musée conserve
aujourd’hui dans ses réserves un ensemble de
quarante-trois oiseaux naturalisés et récemment
restaurés (fig. 3 à 6), complété par des dons
ultérieurs. Il s’agit essentiellement d’espèces
locales, à l’exception d’un héron strié, ardéidé assez
commun en milieu tropical humide
Pour la postérité même si cette galerie didactique
nexiste plus Mougeot reste ce naturaliste
éclairé obnubilé par sa volonté dappréhender la
personnalité complexe de la nature vosgienne et
soucieux de partager son précieux savoir au plus
grand nombre
Les collections d’histoire naturelle
Mougeot, le médecin naturaliste
Un musée vivier de connaissances
Dans les Vosges, quand son activité de praticien
l’y autorise, Mougeot sillonne les sommets de sa
vieille montagne, attentif à l’originalité de sa f lore,
et plus particulièrement celle de la vaste famille des
cryptogames (algues, fougères, lichens et mousses...)
dont il va devenir l’un des grands spécialistes comme
en témoignent ses remarquables publications sur ces
végétaux inférieurs. Éminent observateur de terrain,
il comprend très vite la nécessité d’associer le public
à ce vivier de connaissances en plein essor, et quoi
de mieux que le musée départemental d’Épinal créé
en 1822 pour matérialiser son initiative ? Dès 1833,
une section y est dévolue aux sciences naturelles,
complétée par un jardin botanique. Jean-Baptiste
Mougeot est alors associé à la gestion du musée et
devient membre de la commission de surveillance
de l’établissement. Le savant de Bruyères va enrichir
cette nouvelle galerie d’histoire naturelle de ses
propres collections minéralogiques et géologiques,
de son incroyable herbier régional bientôt étoffé
d’espèces venues de toute l’Europe (f ig. 1 et 2) et
surtout, dans la discipline de la zoologie, les vitrines
vont accueillir un formidable gisement de spécimens
du règne animal. On retrouve ses caractéristiques
en détail dans les rapports que, cinq ans après son
adhésion à la Société d’émulation du département
des Vosges, le docteur Mougeot a tenu annuellement
à partir de 1835 et jusqu’en 1857, date précédant
son décès à l’âge de 82 ans. Sur le seul volet de
la zoologie, selon les notes de l’auteur dans ses
annales et au fur et à mesure de l’accroissement des
spécimens réunis par des dons voire des échanges
avec dautres muséums celui dÉpinal a été lun des
sites parmi les plus riches de lHexagone tout au
long du XIX
e
siècle On trouve ainsi en référence plus
de trois mille oiseaux naturalisés issus de lavifaune
locale mais aussi dhorizons plus lointains jusquen
Amérique latine
U N E H I S T O I R E D E P A S S I O N E T D E G É N É R O S I T É — L E S C O L L E C T I O N S E M B L É M A T I Q U E S
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La collection ornithologique