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l’art populaire. Certes ce concept est ancien puisqu’il
apparaît au XVIII
e
siècle, mais c’est en Allemagne,
au milieu du XIX
e
siècle qu’il se développe avec
la notion de Volkskunde. André Philippe partage
cette même conception. Pour lui, c’est « un art
modeste
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», un art qui s’inscrit par ses modes de
transmission dans une tradition orale. Les œuvres
sont anonymes et créées en dehors d’un système
académique. Cette appellation d’art populaire sera
plus tard discutée.
En 1942, le musée des Vosges participe aux
chantiers EMT (enquête sur le mobilier traditionnel)
orchestrés par l’équipe du musée national des Arts
et Traditions populaires à Paris. L’enquête sur le
mobilier traditionnel EMT 909 a tenté de rassembler
les données, de les structurer et a permis de visiter
les intérieurs de la campagne française ainsi que les
collections des musées. Le dossier du musée des
Vosges est représentatif de la méthode de travail
de l’équipe du chantier. Une note de synthèse décrit
l’intérieur de la salle d’ethnographie et les meubles
retenus pour une monographie. Ces meubles seront
ensuite décrits par une fiche individuelle. La note
donne des indications sur la muséographie. « Ces
meubles sont disposés suivant une reconstitution
de cuisine vosgienne dont l’interprétation s’adapte
à l’ensemble disponible et semble éloignée de la
disposition traditionnelle d’une cuisine rencontrée
dans la région […]. Les mannequins très éloignés du
réalisme représentent une vielle femme assise dans
un fauteuil et une poupée f igurant un enfant dans
un berceau. »
Les meubles retenus pour le travail de la
monographie sont au nombre de quatre un
buffet haut une tablepétrin un berceau et un
tabouret Ce travail décrit dans les instructions
aux enquêteurs doit permettre la rédaction des
monographies sur un même modèle pour constituer
un corpus du mobilier régional Ce corpus sera publié
dans la série le Mobilier régional, avec un volume par
région sous la direction de Jean Cusinier
4
.
André Jacquemin devient en 1953 conservateur du
musée. En 1955, il adresse un courrier au directeur
des musées de France, Jacques Jaujard : « il s’avère
indispensable de créer une salle de folklore régional
et une autre salle plus petite historique de notre ville
d’Épinal. Les objets usuels tous faits par des artisans
deviennent de plus en plus rares et les générations
futures ne doivent pas les ignorer
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. » Il rédige une
lettre aux maires de communes du département
des Vosges pour « rechercher tous les témoignages
du travail et de la vie quotidienne qui dorment dans
les greniers
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. » Pendant plusieurs années, il ef fectue
tous les mardis après-midi des tournées de collectes
avec des membres du conseil d’administration du
musée. Ces tournées régulières suscitent des dons
et un enrichissement des collections. Pendant
la même période des travaux sont entrepris pour
aménager des salles pour une section consacrée
à l’ethnographie régionale. En 1964, dans la salle
Lagarde est aménagée une salle avec le remontage
dune cheminée de Jubainville
Inaugurée en 1968 cette salle reconstitue un intérieur
vosgien Les objets du quotidien sont regroupés
autour de la cheminée dans une présentation
muséographique dense qui évoque une cuisine
Une autre section traite des travaux agricoles et des
métiers de lartisanat en particulier du textile
La création d’une salle d’ethnologie régionale vosgienne :
du folklorisme à l’ethnologie
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L E S A M B I T I O N S D U M U S É E, D’H I E R À A U J O U R D’H U I
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